Vives critiques contre le recrutement intensif d’étudiants indiens au privé
Le gouvernement Legault promet « d’étendre ses vérifications » vis-à-vis d'établissements privés qui se spécialisent dans le recrutement d’étudiants indiens.
Entrée du Collège CDI à Montréal
Le Collège CDI détient plusieurs campus, dont l'un au centre-ville de Montréal. Le gouvernement du Québec indique avoir demande des explications à cet établissement, concernant certaines de ses pratiques.
Activer l’option d’impression du navigateur
Afficher les commentaires
Romain Schué (accéder à la page de l'auteur)
Romain Schué
2 h 55 | Mis à jour à 4 h 22
« J’ai demandé qu’on fasse toute la lumière [sur cette affaire] », a clamé mardi le premier ministre du Québec, François Legault.
Les allégations [...] sont extrêmement préoccupantes, a quant à elle affirmé la ministre de l’Enseignement supérieur, Danielle McCann.
François Legault et Danielle McCann réagissaient au reportage de Radio-Canada faisant état d'une hausse spectaculaire du nombre d’étudiants indiens ayant obtenu un permis d’études au Québec. En deux ans, ils sont passés d’environ 2000 à près de 13 000.
Plutôt que d’étudier dans le réseau public, ces étudiants indiens se retrouvent essentiellement dans des collèges privés, qui se sont spécialisés dans le recrutement en Inde.
Une guerre commerciale est même évoquée entre ces établissements, qui utilisent différents incitatifs pour convaincre ces Indiens de dépenser près de 25 000 $ pour obtenir un diplôme d’études collégiales (DEC), un diplôme d’études professionnelles (DEP) ou une attestation d’études collégiales (AEC).
C’est quelque chose qui, a priori, sent pas bon.
François Legault, premier ministre du Québec
Selon nos informations, l’Agence des services frontaliers du Canada mène une enquête, alors que Québec promet d’étendre ses vérifications, notamment pour s’assurer que le processus d’immigration n’est pas biaisé.
J’ai demandé qu’on fouille ça, a affirmé François Legault. Profiter de ces formations privées pour immigrer dans d’autres provinces, ce n'est pas tout à fait le principe et l’idée derrière les programmes pour accepter les étudiants étrangers, a-t-il lâché.
Dans un communiqué, le ministère de l’Enseignement supérieur précise avoir déjà interrogé le Collège CDI à ce sujet, et les pratiques d’autres collèges vont être étudiées, indique-t-on, tout en mentionnant que ces collèges privés ne reçoivent aucune subvention de Québec.
Si nous constatons qu’un collège n’est pas en mesure de remplir sa mission en formant de façon adéquate les étudiants étrangers qu’il recrute, nous allons agir. Cela peut aller jusqu’à la révocation de son permis.
Danielle McCann, ministre de l’Enseignement supérieur
Le Parti québécois dénonce une marchandisation de l'éducation
D’autres politiciens ont également vivement critiqué cette situation.
Le chef du Parti québécois, Paul St-Pierre Plamondon, a dénoncé ce far west dans le domaine de l'enseignement privé. Le gouvernement n'a pas fait son travail pour prévenir des situations qui exploitent de manière non éthique, très douteuse, la bonne volonté de l'étudiant étranger, a-t-il affirmé.
On est devant tous les problèmes de la marchandisation de l'éducation.
Paul S-Pierre Plamondon, chef du Parti québécois
On a créé un marché du diplôme où on flirte à la limite des lois sur l’immigration, dans le but d’exploiter des gens de l’étranger qui sont à la recherche d’un avenir meilleur. Sur le plan éthique, c’est complètement inacceptable, a-t-il ajouté.
Une enquête approfondie doit avoir lieu, soutient le PLQ
Pour la députée libérale Christine Saint-Pierre, ces agissements apparaissent assez inquiétants. Une enquête approfondie doit être lancée par la ministre McCann, a-t-elle soutenu, en évoquant le travail au noir et la possibilité de diplômes à rabais.
La ministre McCann doit aussi agir au plus vite pour mieux réguler ces formations, dit pour sa part le député de Québec solidaire, Andrés Fontecilla.
Cette situation a toutes les apparences d’un stratagème de contournement des systèmes d’immigration québécois et canadien.
Andrés Fontecilla, député de Québec solidaire
Yves-François Blanchet, le chef du Bloc québécois, a de son côté déploré une pratique purement commerciale qui se moque de la qualité de l'enseignement, pervertit les règles et contribue à l'anglicisation de l'enseignement et du Québec.
Selon Paul St-Pierre Plamondon, Québec doit réagir. Il propose de fixer un seuil maximal d’étudiants étrangers dans les collèges privés et de réglementer le prix [des formations], pour que ce ne soit pas un racket.
Christine St-Pierre partage cette intention, en précisant que la loi 101 ne s'applique pas au niveau collégial.
Il faut voir si les mesures de contrôle sont suffisantes.
Christine Saint-Pierre, députée du Parti libéral du Québec
Le gouvernement est complice, dénonce le Mouvement Québec français
La multiplication de ces formations proposées en anglais irrite également le Mouvement Québec français.
L'éducation devient un peu objet de marchandise, critique Maxime Laporte, le président de cette organisation qui défend la langue française.
Selon ce dernier, les lois actuelles du gouvernement du Québec contribuent à cette prolifération des collèges privés et des formations en anglais.
Nos dirigeants se font les complices de la destruction progressive des fondements de notre système collégial. Et du torpillage du statut du français comme langue d'enseignement.
Maxime Laporte, président du Mouvement Québec français
L'État [...] permet à des businessmen passablement louches de s'en mettre plein les poches, dénonce-t-il.
Avec la collaboration de Sébastien Desrosiers
Romain Schué (accéder à la page de l'auteur)
Romain Schué